Le retrait des États-Unis de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), signé par le président Donald Trump le 20 janvier 2025, reflète une défiance affirmée envers les institutions multilatérales. Ce geste, justifié par des accusations de mauvaise gestion et de « pratiques frauduleuses » de l’OMS, contraste avec le retrait des pays sahéliens Burkina Faso, Mali et Niger de la CEDEAO en janvier 2024. Si les raisons divergent, les deux décisions reposent néanmoins sur une volonté commune de réaffirmer leur souveraineté dans un contexte de crises complexes.
Par Jean Marc Kambou, collaborateur
Dans les pays sahéliens, minés par une décennie d’attaques terroristes, le retrait de la CEDEAO s’inscrit dans une dynamique de rupture. Ces États ont vu leurs populations subir des violences sans précédent : femmes, enfants et infrastructures ont été des cibles de barbaries incessantes. Le tissu social, autrefois résilient, s’est effondré sous le poids des déplacements massifs, plongeant des milliers de familles dans des conditions précaires.
Un contexte sahélien marqué par des choix douloureux mais nécessaires
Malgré les élections démocratiques de 2015 et de 2020, comme c’est la solution à tous nos problèmes quant on écoute certains analystes. Malheureusement, la dégradation sécuritaire n’a cessé d’alimenter un sentiment de frustration et d’impuissance parmi les populations, conduisant à une série de coups d’État militaires.
Le président Roch Marc Christian Kaboré, démocratiquement élu, est renversé en janvier 2022. L’incapacité de son gouvernement à proposer des solutions endogènes efficaces pour restaurer la sécurité et garantir des conditions de vie décentes a scellé son sort.
Le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, successeur de Kaboré, est destitué en septembre 2022, après une gestion marquée par des scandales, des manipulations et une aggravation des attaques terroristes.
Le Capitaine Ibrahim Traoré, un nouvel espoir ? Le 29 septembre 2022, un groupe de militaires dirigé par le capitaine Traoré, prend le pouvoir. Avec un discours axé sur la réorganisation de l’armée et la reconquête de la souveraineté, Traoré incarne pour beaucoup, une renaissance.
Cependant, les relations avec la CEDEAO, perçue comme un instrument d’ingérence étrangère, notamment de la France, se détériorent rapidement.
En janvier 2024, le Burkina Faso, le Niger et le Mali annoncent leur retrait de cette organisation, affirmant leur volonté de répondre aux attentes de leurs populations sans subir des pressions extérieures.
Une analyse renforcée par des personnalités clés
Des figures comme Da Sié de Bindouté, sociologue et journaliste, ont largement contribué à éclairer les choix des pays actuels membres de l’AES.
Sur l’émission « 7 Infos », animée par le célèbre journaliste Hervé Dapa sur la chaîne privée burkinabé BF1, Da Sié a régulièrement dénoncé ce qu’il appelle « une guerre de recolonisation » orchestrée à travers le terrorisme.
Malgré ses interpellations répétées, les décideurs politiques et militaires ont longtemps ignoré ses avertissements.
Ce n’est que lorsque le général Français, Lecointre, ancien chef d’état-major, a confirmé publiquement en avril 2024, les analyses du sociologue burkinabé que l’opinion internationale a commencé à reconnaître la pertinence des propos de Da Sié.
En parallèle, un retrait américain sans tumulte
À l’opposé, le retrait des États-Unis de l’OMS illustre une asymétrie flagrante dans la perception des décisions souveraines.
Le président Trump, fidèle à sa ligne de critique des institutions multilatérales, avait déjà accusé l’OMS de complaisance envers la Chine lors de la pandémie de COVID-19. Cette décision de retrait, justifiée par des accusations de mauvaise gestion et de pratiques financières douteuses, n’a pas suscité d’opprobre notable à l’échelle internationale.
Pourquoi cette différence de traitement ?
Les États-Unis, en tant que première puissance mondiale, exercent une influence considérable sur la scène internationale, imposant souvent leurs décisions sans craindre de sanctions.
Cependant, l’administration Trump a dû naviguer dans un contexte de pressions internationales croissantes, notamment face aux différents lobbys qui cherchent à influencer la politique américaine.
Cette dynamique met en lumière la complexité des relations internationales dans un monde de plus en plus multipolaire.
Dans le contexte ouest-africain, la CEDEAO, face à un défi majeur : le départ annoncé des pays membres de l’AES, qui inclut le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Ces nations, fondatrices de la CEDEAO, ont décidé de se retirer d’une institution qu’elles estiment avoir trahi sa vocation initiale.
Le président Traoré va insister lors d’une interview télévisée en janvier 2024, que c’est un chemin de non retour. Cette décision est irrévocable. Se libérer d’une organisation perçue comme un joug est essentiel pour affirmer la souveraineté.
Les pays sahéliens, sous pression et critiqués pour leurs choix politiques, cherchent à réaffirmer leur autonomie face à une organisation qui ne semble plus répondre à leurs besoins.
En somme, cette situation illustre non seulement les tensions internes au sein de la CEDEAO mais aussi les enjeux géopolitiques plus larges auxquels font face les pays africains dans un monde où la souveraineté nationale doit être constamment défendue.
Alors que les choix américains sont présentés comme stratégiques, les décisions des pays africains sont souvent réduites à des querelles régionales ou à des manifestations d’instabilité. Pourquoi cette différence de traitement ?
La CEDEAO, influencée par des acteurs comme Paris et d’autres partenaires internationaux, peine à s’affranchir de logiques néocoloniales, ce qui explique le rejet croissant de cette organisation par ses membres.
Les pays de l’AES qui se sont désormais réunis au sein d’une confédération, doivent continuer à bâtir des alliances régionales solides, tout en développant des stratégies endogènes pour répondre aux défis sécuritaires et sociaux.