ECONOMIESOCIETE

CENTRE-EST : Commune de Garango, « le consommons local » traduit dans le pain local

Garango, commune semi-urbaine de la province du Boulgou, région du Centre-Est, est une ville sans boulangerie moderne.  C’est le pain local qui est fortement consommé par les populations. Refletinfo.net est allé à la compréhension de la situation.  

Par Wendpouiré Benny Kiemdé

Garango, 7h. Aux alentours du rond-point central de la ville, l’ambiance matinale du jour règne déjà. Des femmes et des hommes, qui à pied, qui à vélo, progressent chacun dans sa direction.

A côté, la gare routière et le marché. Des motocyclistes chargés de cartons, roulent dans tous les sens.

Des convoyeurs de véhicules de transport en commun accostent tout passant à la recherche de passagers. Des marchands commencent à s’installer. Des enfants tiennent du « pain local » emballé dans des sachets.

Devant des kiosques à café, des clients assis, prennent calmement leur petit déjeuner. Ils tiennent en main du « pain local ».

Sur trois étals au bord du marché, trois jeunes vendeurs vident du pain dans des cartons qu’ils étalent sur de grandes tables.

 « Ici, il n’y a pas de boulangerie moderne. C’est « Taab-Nè- naanwan », (le pain local en langue mooré) qui marche », lance l’un d’eux à notre demande.

Quelques raisons d’une absence de boulangerie moderne à Garango

Aucune boulangerie moderne n’offre ses services à Garango. Une quinzaine de géants fours pour le pain local sont parsemés à travers la ville.

Au début des années 2000, une boulangerie moderne a existé selon Idrissa Bambara. Mais, elle a fermé ses portes car elle tournait à perte. « Pourquoi, jusqu’à présent, aucune boulangerie moderne n’existe à Garango malgré le développement de la ville ? », nous sommes nous interrogé.

Lucien Gampéné observe une réserve, soupire et répond. « Je ne sais pas pourquoi. Je suis un enfant. Je ne peux pas me prononcer sur la question ».

Néanmoins, il pense que « la population préfère le pain local. C’est peut-être cela qui a entraîné la fermeture de la boulangerie moderne d’autrefois ».

Du pain local fortement consommé à Garango.

Les raisons pour Lucien Gampéné, se situent sur la qualité des deux pains (local et moderne).

« La population est habituée à cette qualité de pain et rejette celui de la boulangerie moderne. Les gens trouvent le pain local, très lourd. Ce que le pain de la boulangerie moderne pourrait en manquer », soutient-il.

Dasmané Zaré est gérant d’une mini-alimentation et fidèle client de Gampené depuis l’an 2000. Il commande entre 10 000F à 15 000F par jour, soit 200 à 300 pains et plus, en fonction du marché.

Il est un revendeur. Depuis deux ans, il prend aussi le pain moderne, entre 20 à 40 miches par jour à partir d’une boulangerie de Tenkodogo. « A Garango, il n’y a pas de boulangerie moderne et nous consommons ce pain local », dit-il.

Dasmané Zaré, gérant d’une mini-alimentation à Garango.

A notre arrivée, tout le pain (moderne comme local) était fini dans sa boutique. Il nous présente son carnet vert de livraison de la boulangerie moderne.

« Parmi les deux qualités, le pain local est le plus prisé. L’absence de boulangerie moderne nous dérange tout comme ça ne nous dérange pas aussi car chacun à sa clientèle », explique-t-il.

Des jeunes tirent leur épingle du jeu dans la productions du pain local

Lucien Bambara est un boulanger depuis 2018. Son four est installé au milieu d’une vaste cour. Au bas, sur une petite terrasse, quelques pains sont étalés sur une natte en paille.

Il a presque écoulé toute sa production du jour. Entre 2 à 3 sacs de farine de blé habituellement utilisés par jour dans le passé, il utile actuellement 1 sac pour la fabrique du pain local, à cause dit-il, de la morosité du marché. Il a créé son entreprise en 2020 avec un capital de plus de 250 000F.

Pour la fabrique, il se réveille à 1h du matin. Les premiers pains sortent du four à partir de 5h15 du matin.

Avec un sac de farine, il arrivait auparavant à vendre 45 000F à raison de 50 F l’unité, soit 900 baguettes de pains avec au moins, un bénéfice de 20 000F.

Garango-consommation du pain local
Lucien Bambara, boulanger de pain local à Garango.

Il ajoute gratuitement 3 à 4 pains de plus aux clients qui achètent au minimum pour 1 000FCFA. Le cumul de cette gratuité réduit son bénéfice. « Avec tout cela, je m’en sortais bien », affirme-t-il.

Le pain coûte 50F et 100F. Ils utilisent simplement la farine de blé, du sel iodé granulé, de la levure Angèle et de l’eau.

La boulangerie locale est bénéfique. Lucien Gampené, chef de Kayo est aussi un boulanger.Il est dans le métier depuis plus 21 ans.

Garango,Lucien Gampené, boulanger.
Lucien Gampené, boulanger.

Il a difficilement créé son entreprise sur la base de ses petites économies. Il est l’administrateur du groupe WhatsApp de boulangers de Garango, composé d’une dizaine de membres.

Il emploie six apprentis qu’il paie à 1000F par jour ordinaire et 1500F les jours de marché.

Il utilise entre 2 à 3 sacs les jours ordinaires et 4 à 5 sacs, les jours de marché.  De fois, il en reste. « Malgré tout, j’arrive à avoir un bénéfice variable entre 4000F à 10.000F par sac », indique-t-il. Le premier pain sort du four à 4h30 et la livraison commence à partir de 5h.

De l’innovation chez Aligué Zéba 

Des femmes aussi évoluent dans le métier. C’est le cas d’Aligué Zèba, habitante à Zidré, un village situé à 4 Km de Garango. Elle est revenue d’une aventure du Nigéria où elle était restauratrice par terre. Elle est dans l’activité depuis 3 ans.

C’est après un apprentissage de deux jours auprès d’une autre dame aux frais de 15 000F, qu’elle s’est investie dans le domaine.

Elle utilise un mini four moderne, fonctionnant à base de gaz butane. Par jour, c’est avec une quantité de 20Kg de farine de blé qu’elle fabrique son pain soit un sac pour tous les 3 jours.

Son bénéfice par sac est de 5000F. Elle commence à partir de 3h du matin et finit à 7h. Le pain sort du four à partir de 9h.

Aligué Zeba, boulangère à Zidré,Garango.

A son niveau, une légère différence est constatée. Au-delà de la levure et du sel, elle ajoute de l’huile. « Chez moi, le pain est encore plus lourd que le pain local des fours traditionnels », explique-t-elle. 

Les boutiques et autres lieux de commerce sont des points de revente. Idrissa Bambara est un livreur depuis son enfance et vendeur de pain local au rond-point de Garango.

Il vend entre 25 000F à 50 000F de pain par jour en fonction du marché. Il ferme entre 22h à 23h. « Ici à Garango, les gens payent bien le pain local », dit-il. 

Un client habituel rencontré chez Bambara explique sa préférence. « Je suis venu acheter pour mes travaux champêtres. Je préfère ce pain car c’est sain et naturel. Il y a l’hygiène. On a moins de soucis gastriques, car on n’utilise pas du bromate de calcium ou de potassium pouvant entrainer le cancer. Et puis, le taux de sucre est très faible et ils n’utilisent pas des produits chimiques », dit-il.

Un marché morose

Le prix du sac de farine a augmenté sur le marché. De 20 000FCFA, il coûte actuellement 26 500F à la boutique. A cela, s’ajoute la crise securitaire vécue au pays et la pauvreté de la population. Le bois de chauffe coûte aussi très cher. 

« A l’heure actuelle, avec l’augmentation du prix de la farine de blé, le poids du pain a considérablement diminué si bien que la clientèle a aussi chuté. Souvent, je prends une petite quantité mais malgré tout cela, je n’arrive pas à tout écouler », déplore-t-il Idrissa Bambara.

Du pain prêt à être mis au four.

Pour Lucien Bambara, « actuellement, le marché est morose » indique-t-il. « Avant, j’utilisais 2 à 3 sacs de farine par jour pour la fabrication du pain. Mais, maintenant, c’est un sac et souvent même le pain reste sans être écoulé. J’ai encore diminué. On se cherche », déplore -t-il secouant la tête. « Les dépenses restent les mêmes et pourtant, il n’y a pas le marché » s’inquiète-t-il.

Leurs clients proviennent de toutes les couches sociales et des différents villages de la commune.

Des Difficultés n’en manquent pas  

Dans la fabrication du pain local, le bois de chauffe est beaucoup utilisé. Une ressource coûteuse surtout en saison pluvieuse. Un chargement de tricycle ou de charrettes coûte 30 000F. Mais le problème, c’est que le bois du fait de la pluie, n’est pas sec pour faciliter le travail. Cela fait que le chauffage du four prend assez du temps avec une grosse consommation en bois.

…des charrettes de bois de chauffe|New tree

Aussi, les clients prennent le pain à crédit. Ils versent l’argent après-vente. Ce qui peut ralentir les dépenses qui se veulent immédiates. Les taxes annuelles à hauteur de 26 400F sont régulièrement payées. La livraison se fait avec des motos pour une consommation de 2 litres en moyenne par jour.

« Nous manquons de financements pour nos activités », déplore Gampéné. Pour Lucien Bambara, « Le pain resté de la veille est vendu à 25F l’unité avec une grosse perte », ajoute-t-il.

Les boulangers n’évoluent pas en association. Des démarches sont cependant, en train d’être entreprises dans ce sens, indique Gampené.

A lire aussi: GARANGO :Transformation d’arachides en parures, les mains habiles de Kadidiatou Moné

www.refletinfo.net

 

Reflet info

Reflet info est un journal burkinabè en ligne qui vous tient informé 24h/24

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *