Boureima Yonli, conseiller en droits humain et directeur régional des droits humains et de la promotion de la citoyenneté de l’Est.
À l’occasion de la Journée de l’enfant africain, célébrée chaque 16 juin, nous avons rencontré Boureima Yonli, conseiller en droits humains et directeur régional des droits humains et de la promotion de la citoyenneté de l’Est. Dans cet entretien, il revient sur son engagement pour la protection de l’enfant, les défis actuels et les valeurs à transmettre pour un avenir meilleur.
Propos recueillis par Yentéma Daalibiga, correspondant /Est
Refletinfo.net: Qu’est-ce qui vous a motivé à vous engager pour la cause des enfants ?
Boureima Yonli: Ce qui m’a motivé à me spécialiser dans la formation et dans la protection des droits de l’enfant, c’est tout simplement le fait que l’enfant est un être fragile, qui a besoin de protection. Ce n’est pas comme un adulte. En même temps, l’enfant représente aussi l’avenir. C’est ce qui m’a réellement motivé.
Refletinfo.net: La journée de l’enfant africain a été célébrée le 16 juin 2025 sous le thème « Investir dans l’enfant burkinabè, c’est bâtir une nation fière de ses valeurs ». Que représente cette journée pour vous ?
Boureima Yonli: La journée de l’enfant africain est très importante. Elle nous permet de mener des actions de sensibilisation sur la protection des droits de l’enfant. Cette année, elle prend encore plus de sens avec la mise en valeur des spécificités culturelles africaines.
Le thème souligne l’importance d’investir dans nos enfants pour bâtir une nation fière de ses racines. Les enfants sont là, et c’est à nous de les protéger malgré les difficultés. Il nous revient de trouver les moyens, les stratégies et les outils nécessaires pour assurer leur protection.
Refletinfo.net: Comment la journée de l’enfant africain à été célébrée dans la région de l’Est?
Boureima Yonli: En dehors de l’interview que que vous nous avez accordée, nous comptons célébrer la Journée du 16 juin en differé en octobre 2025 à l’endroit des élèves et étudiants déplacés internes et hôtes de Fada N’Gourma afin de les sensibiliser sur les valeurs endogènes de tolérance et de paix au Burkina Faso.
Refletinfo.net: Quelles sont les actions menées par la direction que vous dirigée dans le cadre de la protection et la promotion des droits de l’enfant dans la région de l’Est?
Boureima Yonli: Les actions que la direction régionale (DR) en charge des droits humains de l’Est mène, sont essentiellement les conférences en milieu scolaire, l’appui conseil juridique, l’écoute, l’orientation, la mise à disposition de documents généraux ou spécifiques de droits humains au profit des enfants, élèves usagers du centre d’écoute et de documentation de la DR.
Refletinfo.net: Qu’elles sont les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de ces actions ?
Boureima Yonli: Les principales difficultés, au -delà de celles financières, sont les défis sécuritaires et humanitaires malgré les efforts énormes de l’État et de ses partenaires pour la vie et la survie des enfants de la région de l’Est.
Refletinfo.net: Parlant de la crise sécuritaire, qu’elles sont, selon vous, les principales menaces qui pèsent aujourd’hui sur les enfants ?
Boureima Yonli: Les menaces sont bien réelles. La crise sécuritaire affecte profondément la protection des droits fondamentaux de l’enfant, notamment le droit à une famille et à l’éducation.
Beaucoup de familles sont déplacées, et de nombreuses écoles restent fermées. Cela compromet l’avenir, la sécurité et le développement des enfants. À cela s’ajoutent les problèmes de santé, le manque d’accès aux soins et les risques de recrutement forcé par des individus malintentionnés.
Il faut renforcer notre système de protection, car il n’est pas encore suffisamment robuste. Pourtant, des efforts sont faits, et si nous continuons, nous pouvons espérer une génération bien formée.
Refletinfo.net: Quel rôle l’État et la société doivent-ils jouer dans l’éducation de l’enfant ?
Boureima Yonli: La société, et donc l’État, doivent jouer un rôle déterminant. À partir de 7 ans, il ne s’agit pas seulement d’instruire, mais aussi de transmettre des valeurs. Cela commence dès le plus jeune âge, avec une implication forte des parents. Nos traditions africaines peuvent renforcer les repères de l’enfant. Elles ne sont pas des obstacles mais des leviers puissants.
Refletinfo.net: Comment les communautés peuvent-elles concrètement contribuer à la défense des droits de l’enfant ?
Boureima Yonli: D’abord, il faut que les communautés acceptent les droits de l’enfant, sans tomber dans des formulations trop occidentales. Les droits de l’enfant, ce sont les besoins fondamentaux : manger, être soigné, aller à l’école, être aimé.
Même Dieu a prévu cela dès la naissance. Il faut s’appuyer sur nos traditions : solidarité, partage, respect. On n’a pas besoin d’importer des valeurs. Il faut que l’enfant africain grandisse avec des valeurs africaines.
Refletinfo.net: On entend souvent dire que les droits de l’enfant sont une idée « importée ». Que répondez-vous ?
Boureima Yonli: Il faut sortir du formalisme. Les droits de l’enfant, ce n’est pas une affaire d’ONG ou d’autorités. C’est notre affaire à tous. C’est protéger, nourrir, instruire, entourer l’enfant d’affection.
Refletinfo.net: Quel message souhaitez-vous transmettre à la jeunesse et aux familles africaines, en cette journée ?
Boureima Yonli: En Afrique, rien n’est individuel. L’enfant ne grandit pas seul, mais dans une communauté. Il faut réapprendre cela, enseigner la solidarité dès l’école, surtout avec les enfants déplacés qui ne doivent pas être stigmatisés.
Il faut que les familles comprennent que l’éducation ne doit pas être déléguée. Les actions de l’administration ne suffisent pas si les communautés ne prennent pas le relais.
Refletinfo.net: Quel est votre plus grand espoir pour les enfants du Burkina Faso dans les années à venir ?
Boureima Yonli: Le fait même qu’ils soient des enfants est porteur d’espoir. Mon souhait, c’est qu’ils deviennent des adultes capables de transformer nos habitudes. Je crois profondément en l’être humain, pas en l’argent. C’est l’humain qui est la finalité.
Refletinfo.net: Avez-vous un mot pour les enfants et les jeunes, notamment en ce qui concerne le respect et les droits ?
Boureima Yonli: Un mot pour eux : respecter, c’est aimer, pas craindre. Respecter un aîné, ce n’est pas avoir peur de lui, mais le reconnaître. En Afrique, les droits de l’enfant sont aussi liés au respect, au bien-être et à la responsabilité. Cela protège la famille, et cela protège l’enfant lui-même.

